Télémaque (28) (28/09/2014)

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source : http://ulyssesseen.com

Ici encore, on ne saurait expliquer ce qui se passe dans notre BD sans appauvrir ce que la BD montre elle-même dans cette planche. Stephen est rattrapé par son "cerveau en pleine rumination" (autre exemple du Principe d'Oncle Charles, puisque le mot "brooding" signifie "sombre, cafardeux", ce qui provient apparemment du narrateur, et que cela gouverne les pensées de Stephen dans cette scène). Stephen refait une immersion profonde dans le souvenir de la mort de sa mère, faisant remonter à la surface des images merveilleusement précises - tels ses ongles manucurés rougis par le sang de poux écrasés, etc.

La question est alors de savoir si le fait de voir Stephen comme un écrivain en train de lutter pour prendre possession de lui-même, nous permet de mieux le comprendre là, aux prises avec le souvenir de sa mère. L'ordre qu'il lui donne de le laisser tranquille et de le laisser vivre, a certainement du sens. J'imagine que Stephen est tiraillé entre la tendance de l'écrivain de consigner chaque souvenir d'elle en détail (presque dans le style d'une épiphanie), et sa terreur de faire ressurgir la culpabilité effrayante de sa mort, comme dans un film d'horreur.

Quant aux mots en latin, le professeur Gifford nous donne la traduction du missel Layman : "Sois entouré de la foule étincelante de tes intercesseurs immaculés comme le lys ; sois accueilli par le chœur glorieux des vierges" (NDT : traduit par nous). Il s'agit d'une prière pour les défunts, qui peut être prononcée (d'après le missel, selon Gifford) pour recommander le mourant à Dieu en l'absence d'un prêtre. C'est la prière que Stephen aurait dû faire, s'il avait prié (NDT : pour sa mère).

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